samedi 28 mars 2015

15 - La nuit s'ennuie parfois

http://www.ina.fr/video/I07338699
Pas toujours... Elle s'ennuie quand, toute embrouillardée, elle est seule avec elle-même. Personne ne la visite, ne l'agite, ne l'éclaire... Il en fut ainsi le premier soir de campagne, exil béni. Brume froide, pas de chauve-souris, pas de lune, pas de chants : une ténèbre, un vide, une disparition. Bienfaisante nuit qui s'ennuyait dans l'inexistence.
Mais quelques pervenches, jonquilles et autres muscaris-aux-mauves-museaux plus tard, il y eut cette nuit : des arbres encores nus escaladaient le ciel et au milieu, pimpante, un quartier de lune laissant deviner tout l'astre. Fleuri en dessus par la polaire. Une musique profonde et silencieuse, du silence lumineux.
Et j'ai pensé immédiatement au haïku d'un petit bonhomme de huit ans, cadeau inestimable :
Qui est la nuit ?
Cette nuit si recherchée
Pourquoi sommeille-t-elle dans ma main ?

jeudi 19 mars 2015

14 - Partir encore...

À Martin, in memoriam A. L.
Il était une fois un chaton dans une meurtrière. Les ruines alentours sont des souffrances de pierre. On est saisi par une histoire et par le froid. Pourtant derrière les vestiges, des gens plantent des simples, des plantes aux noms enfouis : pastel, myrte, angélique, origan. Ces mots disent une chanson ancienne, on y croise la médecine et pas loin la sorcière, végétal et minéral sont en épousailles.
Des pierres tombales, ciselées de temps, portent des noms et des dates illisibles sauf à savoir l'occitan et le braille.
Il y a des couleurs de ciels qui vont bien au teint de certains lieux, de certains moments : c'était le cas. Une absence de couleur, une lumière sans luminosité, comme une pâleur, une discrétion, un effleurement de calendrier. Des lieux que l'on quitte parce qu'un instant, on a été fantôme et qu'on craint de le rester...
https://www.youtube.com/watch?v=IG8Q-Shm0pA

jeudi 12 mars 2015

13 comme... vendredi 13 ?

Ben quoi ? C'est rien qu'une petite bête ! Quoi, elle a des piquants ! Mais c'est pour de rire ! Elle arbore aussi des couleurs fantastiques car la nature ose tout : ce bleu turquoise, cet orange, et vert et jaune, allez zou une petite touche de rose, c'est classe ! Je ne me lasse pas.
Et j'aimerais qu'il existe un jeu - vendredi treize oblige - où gagnerait celui ou celle qui jouerait la combinaison de couleurs la plus délirante. Mais qui serait juge ? La chenille, bien sûr !

Haïku de Yosa Buson

Aux poils de la chenille
On devine que souffle
La brise matinale

12 - Poésie sous la Halle


Sereine et enfiévrée, la poésie est énergie. Je découvre, avant d'aller lire quelques textes à la Halle des Chartrons, que le blog de Pierre Rabhi s'appelle " L'insurrection des consciences ". Il y dit, en autres belles choses : " Sachez que les arbres et le vent se délectent de la mélodie qu'ensemble ils enfantent, et l'oiseau, porté par le souffle, est un messager du ciel et de la terre. " Et Bonnafé (merci, VHM), parrain de cette 17ème édition du Printemps des poètes cite Novalis : " Plus il y a de poésie, plus il y a de réalité. "
J'avais prévu de lire un texte... et je ne l'ai pas fait. Je vous le livre maintenant :

Nous sommes si séparés
Sur les lèvres, un éblouissement bleu
Si lestés au plexus,
De l'enfance plein la figure, pourtant.

Sans cran de sûreté,
Sans cran d'arrêt,
Sans mot, sans écran
Directement livrés aux lames.

Les mots n'aiment pas les mots d'ordre.

Merci à Jean-Paul, Meriem et Monique et Guylaine...

lundi 9 mars 2015

11 - Flora Tristan et Condorcet

Médiathèque Flora Tristan, samedi 7 mars. Du soleil. Une douceur palpable. Un lieu clair, agréable. Une écoute de qualité. Un échange vrai, dans " la saveur du réel ", deux univers poétiques qui se croisent et se saluent comme deux amis qu'ils sont. Ils ont à se donner entre eux, se donner à entendre.
Croire au combat obstiné du soleil sur la langue,
la mort, mille et une fois, battue à pique.
Mon sac ajusté à l'épaule. dit Brigitte Giraud dans son beau recueil Seulement la vie, tu sais.
Je veux remercier pour cette poignée de minutes les deux bibliothécaires, Lucilia et Marie-Pierre et les deux responsables du Printemps des poètes, Monique et Meriem : merci à elles pour leur accueil chaleureux et leur sourire.
Et puis :
dans la superbe médiathèque Condorcet (qui a tant fait pour les femmes), à Libourne, une dizaine d'artistes exposaient leur travail. Ici, Clarisse devant ses photos. Elle dit que le paysage saisit son œil, que ce qui le constitue l'appelle. Elle dit encore que les arbres la choisissent et que ses sujets la précèdent. Elle dit enfin qu'elle n'est que leur interprète.
Et j'ajoute que c'est une bonne interprète dans le sens de traductrice et dans celui de musicienne de la lumière.
Et dans ce billet si féminin (à part Condorcet), je dédie ce morceau à mon frère qui me l'a remis en oreille : nous les aimions tant : https://www.youtube.com/watch?v=QexOuH8GS-Y
Oui, je sais, mais pour moi, pas une ride ou alors de belles rides, douces, celles de ceux qui sourient.
P.S. : venez écouter de la poésie, des mots qui chantent et se percutent, Halle des Chartrons, mercredi 11 mars. Nous y serons, Brigitte, moi et d'autres...

jeudi 5 mars 2015

10 - Billet de saison, saison de femmes

Dìptico agudo - Lucie Geffré - 2008
Quelle est la place de la femme dans l'Art, aujourdhui ? C'est la question posée par les organisateurs de la manifestation Fenêtre dur Femmes qui démarre demain à Libourne, médiathèque Condorcet.
La personne qui figure sur ce dyptique expose quatre de ses photos demain. Et c'est une femme - Lucie Geffré - qui a peint une amie femme qui fait des photographies.
Et là, une autre femme peint : Elle s'appelle Martine Dubilé. Elle peint depuis... toujours. Ou disons qu'elle peignait quand je l'ai connue, il y a ... (chut !).
Mes amies écrivent, peignent, sculptent. Aujourd'hui, elles le peuvent. C'est difficile mais elles y arrivent. Moins difficile que pour Sofonisba Anguisola et Artemisia Gentileschi (allez voir ce que ces femmes faisaient !), que pour Rosa, Berthe, Frida, Suzanne et Camille...
Et pourquoi ai-je l'impression que les trois monothéismes y sont pour quelque chose dans cette difficulté des femmes à être reconnues dans leur art ? Pourquoi suis-je persuadée qu'avant, bien avant cette poussée de la vision " maman ou putain ", elle avaient leur place ? Qu'elles n'étaient pas obligées d'aller chercher avec les dents (au prix de quelles souffrances, de quelle folie) une reconnaissance qui la plupart du temps ne venait pas ?
La place qu'elles ont ? Celle qu'elles se sont faite, à l'arrache.

P.S. : j'ai aussi des amis hommes peintres, sculpteurs et photographes, de vrais artistes ; mais aujourd'hui, pardonnez moi, messieurs, c'est à elles que je rends hommage.
Il ne m'importe guère en quelle
Langue être incomprise et de qui !
Marina Tsvetaeva

dimanche 1 mars 2015

10 - L'Aveu des nuits


L'aveu des nuits

Enroulée dans son nom,
La nuit navigue sur la crête de l'ému.
La gerbe jaune de l'arbre fracasse la fenêtre.

Combattante sans armes, sans ennemi,
Absorbée par le guêt des grues,
Je compte les courbatures des draps.

Couchés sur le dos, on boit les litanies vert pomme de l'enfance.
On dévore au gré des jours, des bouts de la mère ogresse, qui son doigt, qui son oreille : ainsi, le temps et nous nous entretuons.
On devient fou, folle du bizutage de la vie.
Pourtant la main douce de l'amour vient lisser la folie, du front vers l'arrière, pour peigner les pensées hirsutes.

Au matin, on pose les pieds sur un tapis de douilles

Décembre 14

9 - Cours y vite...

Cours y vite, cours y vite, il disait ! Le bonheur est... Galerie des Beaux Arts, il a pour nom Bissière. C'est un grand.
C'est un poète :  avec ses titres et ses couleurs, ce qu'il dit de la terre, des arbres, des feuilles, du soleil, jointe au cœur du vrai et au vrai du cœur. Le parcours de l'expo m'a paru bizarre mais l'arrivée sur les dernières toiles est un choc.
J'ai oublié bien des choses inutiles. J'en ai appris d'essentielles.
Peut-être ai-je appris à regarder en moi-même.
Les bêtes, les arbres, le vent et le soleil, ce qu'aima tant le petit frère d'Assise, tout cela a pris pour moi un sens nouveau, son sens véritable.
Un sens profond, dense et lourd.
Je me suis senti saturé d'un monde d'images et de couleurs dont il fallait absolument s'alléger. (...)
Et si quelques-uns, ayant regardé s'attardent et sentent sourdre quelque sympathie pour l'homme que je suis, j'aurai gagné.
Si j'ai perdu et si nul ne me tend la main, je remettrai les miennes dans mes poches, plus profondément
Limpide.
Pardonnez la médiocrité des photos mais je n'ai pas trouvé les toiles que je cherchais sur la toile (pourtant si vaste). J'en ai encore plein les yeux, des accointances de traits, des attouchements de couleurs : de la beauté. Et il m'en venait des mots que je repoussais parce qu'il faut rester à sa place et que regarder requiert une disponibilité totale. Courez y vite !
Et, depuis plusieurs jours, j'ai en tête Si tu passes là-bas vers le Nord (merci Eva) et, pardon Anne, je préfère la version de 1964 à celle - superbe, j'en conviens, avec Johny Cash. Cela n'a aucun rapport avec Bissière.

Quoique...
https://www.youtube.com/watch?v=pZ_MtHvqczA